LinkJuice, la grenouille qui veut devenir bœuf

Dernière mise à jour 26 août 2019 à 23h19min
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Dans le monde des sites web et blogs, il y a d’un côté les éditeurs, ceux qui gèrent et animent leur site/blog, et de l’autre les visiteurs. Une troisième catégorie est rapidement venue se greffer sur ces deux là : les annonceurs qui, voyant qu’une cible potentiellement intéressante visite tel ou tel site web, cherchent naturellement à être présent sur le site ou blog [1].
Appâtée par le trou de souris qu’elle rêve de voir devenir abîme entre les annonceurs et les éditeurs, une quatrième catégorie s’insère : celle des plateformes de mise en relation, une sorte de Meetic de la publicité en ligne. Il y a de la place pour cette 4e catégorie, néanmoins ce qui s’est passé dans d’autres secteurs dont le tourisme oblige à un peu de bon sens.
LinkJuice fait partie de cette catégorie et ses CGV valent leur pesant d’or, justifiant l’effort de cet article...
LinkJuice veut devenir THE plateforme où les annonceurs et les éditeurs se rencontrent et font du business, de manière à se nourrir très grassement et longtemps.
Voici un aperçu des « partenaires » de LinkJuice (logos issus du site de LinkJuice) :
La rémunération : 30% pour un simple lead ou 50% pour un taf un peu plus sérieux
Un simple lead = 1 an de commission
Si LinkJuice se contente juste de mettre en relation, c’est à dire générer un lead, c’est 30% de commission sur l’intégralité des prestations fournies par l’éditeur à l’annonceur, non pas lors de la mise en relation mais pendant 1 an.
Imaginez si Google prenait 30% de commission à chaque transaction aboutie ! Et en plus pendant les 12 mois qui suivent !!!
Négociateur, quel généreux métier !
Si LinkJuice se foule un peu la rate, mène la négo et aide à la création du contenu de l’annonceur, c’est 50% de commission sur la prestation et de facto 30% sur les prestations que l’annonceur et l’éditeur pourraient vouloir conclure hors de la plateforme LinkJuice dans les 12 mois qui suivent.
Si on résume, l’annonceur ne fait pas son boulot de rédaction/mise-en-page et c’est l’éditeur qui règle la note ! #cestpasbeaulavie
Le paiement : du grand foutage de gueule
Que l’on soit annonceur ou éditeur, le processus d’inscription entraîne la création d’un wallet ou portefeuille interne à LinkJuice. LinkJuice intervenant comme tiers de confiance encaisse l’argent de l’annonceur pour la reverser à l’éditeur. Rien d’extravagant dans ces clauses au premier abord, c’est assez classique.
Côté annonceur
Si t’es annonceur et que tu veux causer à cet éditeur, d’abord du mets des sous suffisants (c’est à dire égaux ou supérieurs au moment affiché de la publicité de l’éditeur) sur ton compte et seulement après tu as le droit de lui parler.
Imaginez que pour réserver une chambre sur Expedia, il faille d’abord alimenter son compte...
Côté éditeur : double effet F...-Cool
Le premier point d’achoppement vient du fait que l’éditeur verra son wallet crédité de sa rémunération 30 jours après la réalisation de la publicité :
6.2. Paiement .../... L’Editeur percevra le montant dû en rémunération de sa prestation dans un délai de trente (30) jours à compter de la réalisation de la prestation au bénéfice de l’Annonceur
30 jours pour débloquer des sous sur un wallet en 2018, ça paraît juste anachronique. Imaginez si AirBnB payait un hôte 30 jours après l’arrivée d’un client !
Le second point d’achoppement vient du fait que l’éditeur ne peut décaisser de son wallet qu’une seule fois par période de 30 jours.
11.6. Retrait des gains des éditeurs .../... L’Editeur peut effectuer une seule demande de retrait tous les 30 jours.
Qu’est-ce-que ça veut dire ? Imaginons qu’un éditeur travaille simultanément avec plusieurs annonceurs tous apportés par LinkJuice. Si jamais la réalisation des différentes publicités n’est pas synchrone, l’éditeur va d’abord attendre 30 jours pour voir son wallet crédité puis devra ensuite attendre encore 30 jours s’il a eu le malheur de vider une fois son wallet, même partiellement, en début de mois. Une erreur de manip, et hop le pognon est gardé 90 jours !!!
Dans la vraie vie des vraies entreprises en dehors du web, le délai légal de paiement est par défaut de 30 jours et ne peut pas dépasser les 60 jours calendaires !
Les petites lignes
Et encore faut-il que la somme à retirer soit supérieure à 100 € sinon... :
1.6. Retrait des gains des éditeurs. L’Editeur peut faire une demande de retrait de ses gains uniquement s’il atteint le montant minimum de 100 EUR.
Mais au fait, quand une entreprise agit en tant que tiers de confiance, l’argent doit être placé sur un compte séquestre... On se souvient du brave Constellation Network qui voulait confisquer le pognon des hôtels pendant 45 jours avant que PagesJaunes, son principal et presque unique client ne se porte caution, cf. la série d’articles dont le dernier est exclusif : PagesJaunes répond aux questions de TendanceHotellerie.
Modification de CGV
A tout moment, la Société (LinkJuice NDLR) se réserve le droit, à sa seule discrétion, de modifier les CGV. Toute modification prendra effet immédiatement après sa mise en ligne sur la Plateforme.
Ça rappelle le comportement de géants du web, ce que n’est clairement pas LinkJuice. Sauf que les états européens ou même l’Europe ont sérieusement sanctionné les clauses manifestement abusives de ces (vrais) géants du web. #ouimaiscestpaspareil
Comparatif avec Booking .com
Que n’a t’on entendu à propos du « méchant » (ce sont les hôteliers qui le disent) Booking.com. Pourtant :
- Booking ne facture QUE 17% de commission
- Booking ne facture sa commission QUE sur la réservation en cours, aucunement sur les potentielles réservations de CE client dans CET hôtel sur les 12 prochains mois
- Booking ne confisque pas l’argent de l’hôtel pendant 30 à 60 jours
Conclusion
Monsieur le CEO de LinkJuice, la prochaine fois que vous contactez un éditeur de site web pour le harponner avec vos conditions à faire retourner Zola dans sa tombe, renseignez-vous. Parfois l’éditeur lit les CGV et réagit...
En tous les cas, Félicitations Monsieur l’entrepreneur web 19e siècle, vous venez de rejoindre le « coin des vilains » de TendanceHotellerie, un modeste webzine B2B spécialisé dans le domaine de l’hôtellerie, un « poulet prêt à plumer » dans votre jargon.
Les CGV :
[1] On ne va pas s’éterniser sur l’absence de transparence de certains sites qui ne disent pas clairement qu’un contenu a été sponsorisé, ou qui ne disent pas qu’ils ont été rémunérés (en argent, par échange marchandise, etc...) pour faire la promotion d’un produit ou service. Ce n’est franchement pas le sujet de ce post.
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