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mercredi 22 mars 2023

Oh my God ! Booking compte ses sous...

 

La semaine dernière, le microcosme hôtelier a été le théâtre d’un séisme* véritablement extraordinaire : Booking a décidé de facturer sa commission sur les miettes que représentent les noshows et annulations, et uniquement quand l’hôtel les a bel et bien encaissés. En déformant légèrement Le Cid, «  N’avons-nous donc tant vécu que pour cette infamie ?  »

 

Des miettes ?

Soyons sérieux : l’immense majorité des revenus de l’hôtel est consituée de vrai chiffre d’affaires, pas de frais d’annulation.

Si un hôtel fait plus de business sur ces « miettes » que sur son métier d’accueil, alors il y a un vrai problème. A moins qu’il ne facture allègrement les chambres qu’il a relouées... #chuuut

 

Dans la pratique

Certains hôtels facturent systématiquement les noshows et annulation tardives. D’autres agissent avec l’humanité nécessaire.

Enfin, une minorité d’hôtelier(e)s a une vision optimiste du monde qui l’entoure et n’en facture pas ou peu, à moins qu’ils ne soient mieux organisés et donc plus à même d’en éliminer beaucoup.

Pas possible ? Il suffit JUSTE de parler avec ses clients ! Encore faut-il le faire de la bonne manière et surtout au bon moment.

 

Y-a-t-il eu prestation ?

Euh... non. En fait l’hôtel n’ayant pas délivré de prestation au client ne peut pas la facturer comme telle.

En lieu et place il encaisse une somme équivalente à la prestation, somme qui est destinée à couvrir le préjudice de la perte de chiffre d’affaires : il s’agit d’une indemnité compensatrice enregistrée comptablement en profit exceptionnel, hors CA, et donc sans TVA.

 

Booking est-il dans son bon droit ?

Booking a rendu un service à l’hôtel et sur un simple plan de bon sens, ce service mérite d’être rémunéré dès lors que l’hôtel encaisse une somme couvrant tout ou partie de la réservation.

Si un(e) hôtelier(e) n’est pas d’accord avec ce principe, ceci veut-il dire qu’un client peut « oublier » de payer sa chambre ? Ah oui mais non c’est pas pareil. #faiscequejedispascequejefais

On peut pinailler sur le fait que Booking décide seul, néanmoins quel motif légitime pourrait empêcher Booking de le faire ?

 

Donc si on résume bien

  • un hôtel et Booking sont des PAR-TE-NAI-RES commerciaux : ils se sont mis d’accord pour que le second fournisse au premier des clients « clés en main »
  • Booking a envoyé une réservation à l’hôtel, par exemple pour 110 € TTC (100 € HT)
  • le client ne se présente pas ou annule hors délai
  • l’hôtel débite 110 € de la carte de paiement du client
  • ces 110 € passent directement en profit exceptionnel, alors que la logique voudrait que l’indemnité ne couvre que le HT et pas le TTC
  • le montant hors taxe, soit 100 €, comprend des frais fixes que l’hôtel assumera de toute façon, par exemple ses frais de personnel, néanmoins l’hôtel fera l’économie des frais de linge, des produits d’accueil, de l’électricité, de l’eau...
  • les 10 € de TVA sont un bonus sorti du chapeau. C’est certain que ce montant indemnise un vrai préjudice, celui de ne pas avoir à restituer l’argent de la TVA à l’état !
  • Booking facture enfin (après presque 20 ans) sa commission sur ces sommes, ce qui paraît plutôt normal

Au fait, quand on annule un billet d’avion non-remboursable, la compagnie aérienne rembourse... les taxes. Il faut parfois insister un peu, néanmoins elle a obligation de le faire !

 

Le double effet KissCool de la pré-autorisation

Pour inciter les hôtels à insérer des tarifs flexibles, Booking pousse, plus que de raison, les hôtels à se servir de la pré-autorisation et on pourrait s’interroger sur son utilisation abusive par les hôtels.

En diffusant la pub « vous pouvez annuler sans frais », Booking pousse les clients à réserver même s’ils ne sont pas certains de venir, avec à la clé plus d’annulations. C’est jackpot pour Booking :

  • plus de résas au total ⟹ encore plus de commission
  • plus de noshow et annulations hors délai ⟹ encore plus de commission

Pourtant sur un simple plan de bon sens, si un tarif est flexible, la seule chose que l’hôtel peut faire avant l’heure limite d’annulation sans frais, c’est de vérifier la validité de la carte : pour cela il existe une procédure de vérification qui n’est pas un débit ni une pré-auto et pour laquelle la machine va dire :

  • la carte est valide
  • la carte est invalide

M’sieur Booking, c’est minable de pousser les hôtels à abuser de la pré-auto sans en informer correctement le client (client pas informé sur mobile, client informé sur desktop mais sans indication du montant) car au final c’est le client qui subit tout ceci

Sur grand écran, Booking dit « vous paierez à l’hôtel » puis si on survole les logos de carte on est prévenu du fait qu’une pré-auto est possible, mais sans donner de montant :

Sur mobile, rien, nada...

 

Un doute sur la pré-auto ? Alors relisez « Du bon usage de la pré-autorisation », un article toujours autant d’actualité malgré ses 5 ans.

 

Et comment font les autres acteurs du tourisme ?

A-t-on déjà vu quelqu’un donner une CB en garantie à sa compagnie aérienne et ne payer le billet qu’une fois arrivé à la porte d’embarquement ? #cestpaspareil

Bon nombre d’activités touristiques sont également réglées à la commande.

Les « anciens » ont connu les arrhes, ce truc bizarre qui s’écrit au pluriel et avec un « h ».

Y aurait-il d’autres solutions que la pré-auto ? #impossible

 

Le vrai sujet ne serait-il pas celui de la commission sur la TVA ?

Si un sujet devrait réellement provoquer une mobilisation générale, ce serait plutôt le fait que Booking facture sa commission sur le TTC et pas sur le HT.

Où a-t-on vu qu’une commission s’applique sur des taxes ? En tous les cas l’état laisse faire.

Si un jour il fallait exiger de payer la commission sur le HT, alors le client serait en droit de ne payer une indemnité compensatrice de son noshow /annulation que sur le HT de sa réservation, pas sur le TTC. #ahouimaisnon

 

Conclusion

Qu’elle est belle la vie de celles et ceux qui n’ont pour seule occupation que de couper les cheveux en quatre et se plaindre. Si le sort des clients était une vraie et profonde préoccupation de ces grincheux d’opérette, ça se saurait !

Pendant ce temps, il y a une majorité d’hôtelier(e)s qui se préoccupent plus de leurs clients que du reste, et parmi eux des hôtelier(e)s qui ont compris que pour vendre il fallait faire du commercial : avoir des outils, être formé, avoir du personnel formé, se remettre en question, apprendre...

Sinon, faut-il voir cette décision de Booking comme une tentative de racler les fonds de tiroir dans une situation où la croissance est compliquée et un contexte où passer à 18 ou 20 % de commission ferait jaser ?

 

* Ce type de catastrophe naturelle n’est pas un sujet risible. Néanmoins, y faire référence a pour but de démontrer l’absurdité des commentaires Internet à propos de cette affaire Booking et leur manque total de recul.

 
 
 
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    Les commentaires


    1. le 7 novembre 2017 à 15:47, par Julien L.

    Certes, il n’y a pas mort d’homme avec cette histoire de commission sur les no-shows, et leur position est tout a fait compréhensible, mais :
     il faudrait que Booking.com cesse de nous appeler « cher partenaire » lorsqu’ils prennent des décisions unilatérales (ou l’inverse... qu’ils cessent de prendre des décisions unilatérales pour que nous continuions à nous sentir traités comme des partenaires).
     relisez vos contrats booking.com : il est clairement stipulé que la commission est due sur les nuits passées par le client chez l’hébergeur (par définition, un client no-show n’a pas passé la nuit à l’hôtel...)
     l’indemnité de no-show (non soumise à TVA) ne couvre pas uniquement la perte de CA « hébergement », mais tout le chiffre d’affaires induit définitivement perdu : garage, minibar, bar, spa, restaurant et autres prestations que le client aurait potentiellement consommé s’il était venu ou qu’un autre client aurait consommé si on n’avait refusé sa demande de séjour du fait d’un planning complet...
     enfin, ne confondons pas les « noshows » sur des réservations non prépayées au plein tarif (flexible, généralement annulable jusqu’à 16 ou 18h le jour de l’arrivée), de la non présentation sur des réservations prépayées à tarif préférentiel (non flexibles) : s’il y a plus de contrainte à réserver les tarifs préférentiels, pourquoi conserver des pleins tarifs ?

    2. le 7 novembre 2017 à 15:53, par Hotel le Manoir Saint Michel

    Commissionner les noshow/annulations Booking : je suis surpris car je croyait que c’était la norme depuis des lustres. Et encore plus en voyant la bronca que cela génere. L’article resume bien l’ambiance.

    Juste un petit point ou je ne suis pas d’accord (mais cela concerne très peu d’hotels qui alouent le numero des chambres avec le client a chaque résa) :
    [...]Y-a-t-il eu prestation ?
    Euh... non. En fait l’hôtel n’ayant pas délivré de prestation au client ne peut pas la facturer comme telle.[...]

    En fait si. Enfin pour les hotels qui louent chaque chambre specifique a chaque client. Ex : a partir du moment ou le client reserve la chambre 20 en Novembre pour l’ete suivant (elle est unique, comme chaque chambre de l’hotel), elle est refusée pendant des mois a d’autres clients qui veulent cette chambre et pas une autre.
    Donc si cette chambre est « bloquée » pendant de long mois et annulée au dernier moment, c’est pas sure qu’elle soit relouée.

    3. le 7 novembre 2017 à 15:58, par Guilain Denisselle

    Vite une boite de mouchoirs...
    Plus sérieusement, Qui en 2006 a alerté les hôtels sur l’utilisation abusive de la marque ? qui en 2008 a initié un mouvement destiné à faire s’assoir les OTAs avec les hôteliers français ? (réponse commune : moi). Qui a cassé la dynamique à l’époque car l’idée ne venait pas d’eux ? (réponse l’UMIH).
    Aujourd’hui qui discute avec Booking ? (réponse : le GNI, mais avec un pouvoir de négociation réduit).
    Il y a pourtant des sujets bien plus importants à discuter avec les OTAs qu’un montant de commission : par exemple éviter résas pour visa, harmoniser les systèmes de paiement, etc... sans oublier la marque.
    Sinon, personne ne vous dit de ne pas facturer les frais d’annulations. je recommande de ne pas oublier qu’il y a un être humain de l’autre côté de la résa...

    4. le 7 novembre 2017 à 16:09, par Guilain Denisselle

    Une prestation de service est quelque chose dont la définition se trouve dans le Code Général des Impôts.
    Une chambre annulée ne peut par définition pas être facturée en tant que prestation de services et aucune TVA ne peut lui être ajoutée car aucun service n’a été fourni : pas de lit à faire, pas de douche à nettoyer, pas de pdj servi, etc.... Par contre, rien n’empêche l’hôtelier d’être dédommagé à hauteur du préjudice.
    C’est une question de sémantique, néanmoins c’est important car qui dit prestation de service dit TVA. Si 10% de comptent pas pour vous, ça compte pour beaucoup :)

    5. le 8 novembre 2017 à 06:45, par Frédéric

    Que l’on soit d’accord ou pas, j’ai lu avec attention le message Booking.com et à la fin de celui-ci, il est marqué la chose suivante, je cite :

    « *Pour le moment, les non-présentations et les autres conditions de réservation ne sont pas concernées. Nous vous informerons à l’avance de toute modification importante que nous apporterons à cette procédure. »

    Le terme POUR LE MOMENT me laisse tout de même perplexe !

    6. le 10 novembre 2017 à 17:00, par TH

    Décidément il y a des gens qui ne savent pas lire : pas d’email valide = message pas publié !!!

 
 
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