Bouh le méchant Booking
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L’incompétence et l’opportunisme n’atteignent pas le nombre des années ; c’est le moins qu’on puisse penser en lisant un article qui tente d’expliquer que Booking.com est très vilain. Bouh le méchant Booking.com. On avait déjà subi les assauts du même opportuniste à l’époque d’une pétition contre les OTAs. Depuis ce flop, l’incompétence de son auteur ne s’est pas hélas pas étiolée au fil des tentatives destinées à convaincre qu’il a compris le problème dans toutes ses dimensions. Rassurons-nous car pendant ce temps la marmotte continue à mettre le chocolat dans le papier alu...
Dans cette longue bataille menée par d’autres depuis 2006 contre les abus d’Internet dans le monde de la distribution hôtelière électronique, il faut donc lutter d’une part contre les véritables abuseurs mais, et c’est le plus désespérant, également contre les contre-vérités répandues par une horde « d’experts » qui ne cesse de croître, bon nombre d’entre eux sentant le bon filon de l’hôtelier désespéré prêt à tout et surtout prêt à être tondu. Trop rares sont les experts qui connaissent chirurgicalement cette relation « je t’aime, moi non plus » qui lie les hôteliers aux OTAs. C’est plus que dommage car de vrais renforts seraient bienvenus. Un exemple : qui a oublié l’agitation effrénée d’une multitude de gens à propos de la parité, cet outil qui est pourtant l’ultime rempart du petit hôtelier et qui lui évite encore (mais pour combien de temps ?) d’être totalement broyé par les OTAs qui jouent entre eux et surtout pour eux avec ce qu’ils ont sous la main (les hôtels NDLR).
Mais au fait, qu’a donc fait le vilain Booking.com ? Et bien il a fait ce que font TOUS les magasins multi-marques : on trouve dans la même allée, le même rayon, le même rayonnage, le même niveau des marques comme Panzani ou Barilla, Bonduelle ou Géant Vert, Nesquick et Benco, Bonne Maman ou Andros, Jacques Vabre ou Nescafé, Lanson ou Moët, Perrier ou Evian, Coca ou Pepsi, bœuf ou agneau, maquereau ou morue, etc... Faut-il continuer la liste de marques/produits concurrents qu’un magasin fait figurer côte-à-côte, plaçant ou non l’une devant l’autre en fonction du prix ou en fonction d’un avis de consommateur ou ... les marges ? Le principe du supermarché est-il compris ? Booking.com pousse à changer de page pour mieux et moins cher ? Si on se place du côté client, c’est plutôt normal, enfin disons que c’est normal pour celui qui cherche à satisfaire ses clients et à les fidéliser.
En prenant un minimum de recul et en se posant les bonnes questions, on se dit que jouer les vierges effarouchées à propos de Booking.com n’est pourtant pas la meilleure posture à adopter, tout particulièrement quand on se veut journaliste :
- les hôtels présents sur Booking.com ont SIGNE UN CONTRAT : on ne peut pas accuser Booking.com de publier des informations sans y avoir été autorisé. Quoi qu’on en dise, Booking.com ne fait pas partie des sites qui gagnent impunément beaucoup d’argent sur des hôtels avec lesquels ils n’ont strictement aucun arrangement comme un certain ...
- ce contrat N’EST PAS EXCLUSIF. En d’autres termes, Booking.com ne s’engage pas à refuser de travailler avec les hôtels alentour, pas plus que l’hôtel ne s’interdit de travailler avec d’autres partenaires OTAs, grossistes, TOs...
- ce contrat NON EXCLUSIF n’impose aucune forme de déontologie ni de considération métaphysique/philosophique/religieuse/morale/... Au contraire, il y est clairement indiqué que Booking.com fera tout ce qui est en son pouvoir pour réaliser des ventes
- ce contrat autorise Booking.com à présenter les hôtels comme il veut, quand il veut, où il veut (sur Booking.com ou chez un affilié, ou sur un comparateur, ou...). Booking.com ne s’engage à aucune forme d’exclusivité dans sa présentation
- quand l’internaute a déjà visité les pages d’autres hôtels sur Booking.com, Booking.com affiche une vignette de chacune des pages d’hôtel récemment visitées. On parle de retargeting...
- Booking.com est SEUL RESPONSABLE de la mise en place, de la mise en forme, de l’affichage, du contenu, des couleurs, des outils... sur son site de manière globale : première page, pages de recherche ou page d’un hôtel en particulier. Personne n’impose à un hôtelier d’avoir des rideaux à rayure plutôt qu’unis, et bien c’est la même chose pour Booking.com qui est chez lui sur son site en train de faire son boulot. Il n’est pas en train de reproduire à sa sauce des informations pompées ailleurs !
- Booking.com réalise sa mission qui consiste à vendre des chambres d’hôtel avec un brio qu’il est primordial de rappeler. Le groupe Priceline a vendu 270 millions de nuitées en 2013 quand son challenger Expedia en vendait 146 millions. Si on regarde du côté des hôtels, beaucoup trop de sites d’hôtels sont encore à pleurer : une ergonomie vintage, l’absence de réservation en ligne (s’il veut une chambre ilakatéléfoné), l’incapacité à visualiser ce que vend l’hôtel, à savoir des CHAMBRES...
- Booking.com plait aux clients. Avez-vous eu beaucoup de plaintes de clients à propos du choix ou de l’ergonomie ? Les 270 millions de nuitées traduisent plutôt le contraire !
A ce jeu du site qui affiche sur la page d’un hôtel les liens de réservation, les prix, les notations, etc vers d’autres hôtels, on peut citer tous les sites marchands comme les OTAs, tous les métamoteurs sans exception, le célébrissime TripAdvisor... et même des sites non marchands comme des sites institutionnels. L’une de ces vierges effarouchées s’est-elle demandée ce que souhaite voir le client ? Il souhaite pouvoir choisir facilement, rapidement, en fonction de critères de prix, localisation, qualité qu’il place lui même dans l’ordre qui lui plait.
En cherchant mieux, on peut trouver d’autres points véritablement litigieux concernant Booking.com :
- l’anonymat des commentaires, pas côté affichage public, mais côté back-office hôtelier : « tu n’as pas été sage mais je ne dirai pas quand ! »
- l’affichage aléatoire des réponses des hôteliers aux commentaires : on aurait pu croire que l’annonce récente de Booking.com concernant le droit de réponse des hôteliers serait réelle, mais non car Booking.com réalise des tests ce qui en bon français signifie que Booking.com choisit (censure ?) les réponses en fonction de critères encore et toujours inconnus
- les affichages trompeurs (et surtout faux) sur les pages des hôtels comme par exemple « dernière réservation il y a 6 centièmes de seconde » ou bien « 254 789 internautes sont en train de visualiser cette page en même temps que vous »
- les fausses promotions : 32 € au lieu de 600 € en exagérant à peine, tout particulièrement quand les prix sont à l’année aussi lisses que
le crâne d’un chauvela coquille d’un œuf :) - la totale opacité de l’algorithme de classement des hôtels. Pourtant le client mériterait d’être informé du fait que l’hôtel qui apparaît en tête de liste est meilleur pour Booking.com que pour lui
- le brandjacking qui consiste en l’utilisation abusive de la marque d’un établissement. Quand l’internaute a été alpagué par le squat de Booking.com sur la première position payante sur son très cher allié Don Corleone Google, on peut ergoter sur la présence d’autres hôtels sur cette page d’atterrissage. Pourtant leur présence n’est que la CONSEQUENCE du détournement, pas la cause (la cause étant le brandjacking NDLR) !
- les abus répétitifs de position dominante, notamment à chaque changement de contrat
- l’affiliation incontrôlée :
- d’une part les affiliés ne reproduisent pas forcément les informations de contenu (textes, images, aménagements...), mais le pire c’est que Booking.com s’en lave les mains. En cas de plainte du client, c’est à l’hôtel qu’il appartient de gérer ce problème, par exemple une piscine fermée, pas à Booking.com, même si l’hôtel avait prévenu Booking.com à temps
- l’impossibilité de choisir les affiliés sur lesquels on ne souhaite pas être affichés. L’hôtelier ne contrôle donc pas son image et ceci paraît infiniment plus litigieux que d’être présent sur le même rayonnage que son voisin
On attendait une intervention des gendarmes à l’encontre de Booking.com comme celle contre Expedia, à défaut d’une assignation reprenant l’intégralité des points relevés dans l’excellent rapport de la CEPC. Le service de presse du Ministère du Tourisme ne parvient pas à donner une date d’assignation et se contente d’un « c’est pour bientôt ». Si un véritable arbitre était présent, il ne fait aucun doute que les pratiques contractuelles litigieuses seraient corrigées. La présence d’un arbitre ne permettrait pourtant pas de réguler les affichages dans les rayonnages de l’hypermarché Booking.com.
Au final, si un hôtel ne se satisfait pas des pratiques des ogres de la distribution, la résiliation de son contrat est une option relativement simple à initier, mais plus compliquée dans la pratique car elle l’obligerait à faire tout le travail de marketing de son établissement avec à la clé des coûts d’acquisition élevés. La vraie solution n’a pas changé d’un pouce depuis les débuts d’Internet : c’est en se regroupant et en mutualisant les coûts que les hôtels pourraient très sérieusement diluer l’impact des OTAs. Il est tellement plus simple de rendre ces OTAs coupables de tout plutôt qu’à travailler avec son voisin, le sien, et ainsi de suite. Pire, il faudrait être transparent, oh my god !
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