La mascarade TripAdvisor sur la scène du NASDAQ

Tweet |
Après avoir longtemps snobé les hôteliers, trop concentré à se gaver sans effort sur leur dos, la passoire TripAdvisor™ a ces toutes dernières années changé son fusil d’épaule, non pas que les hôteliers gagnent en considération pour leur propre hôtel, mais plutôt que ce $$$cher$$$ TripAdvisor™ puisse grossir plus vite en faisant bosser les hôtels au service de sa grandeur. Maintenant les hôteliers ont droit à des Territory Manager, le nouveau titre qui remplace celui (trop commercial NDLR) de « Responsable/Directeur de l’Espace Contacts ». Ne nous y trompons pas, ces personnes en charge de territoires/pays à travers le monde dépendent du service commercial et ne sont en aucun cas disponibles pour aider les hôteliers à régler des problèmes d’avis, y compris les plus bidonnés : il suffit d’écouter à 1min38 le « je ne m’occupe pas des avis » dans la vidéo du Territory Manager France & Benelux lors du MasterClass TripAdvisor du 12 juin 2013 à Paris pour en avoir le cœur net :
Et si on regardait en détail ce qu’est cette machine à cash ?
Plan
Mais en fait, qu’est-ce que l’idée de base de TripAdvisor™ ?
Ce que TripAdvisor™ dit à ses actionnaires
Ce que TripAdvisor™ ne dit à personne
En pratique
Trafic = pognon
Social = trafic = super pognon
Métamoteur = maxi pognon
Comment TripAdvisor™ transforme de braves hôteliers en moutons écervelés ?
Avis Express, le cheval de Troie
TripAdvisor Connect, miroir aux alouettes
TripAdvisor Insight, outil de propagande
Les hôtels, nouveaux rabatteurs de trafic
Profiter gratuitement du système
Le mot à la mode : algorithme
Qui a décidé que TripAdvisor™ dominait le monde (du voyage numérique) ?
Et si on parlait de domination hôtel par hôtel ?
Le traitement réservé aux mauvais
Le traitement réservé aux bons
Responsabilité des faux avis
Conclusion
Mais en fait, qu’est-ce que l’idée de base de TripAdvisor™ ?
Le concept de base consistait à permettre aux internautes regroupés en une communauté de partager leurs expériences d’hôtels. Il faudrait être moyenâgeux pour trouver que ce concept est mauvais. Au contraire, c’était le moyen pour le client de se libérer de la contrainte parfois et même souvent trop complaisante de guides « professionnels ». Depuis, le roi dollar a fait chavirer l’idée de base puisque les développements commerciaux et techniques n’ont pour vocation unique que d’augmenter les bénéfices. Et à ce jeu-là, ça marche avec 1,15 milliard de dollars cumulés en bénéfice net (après impôts) entre 2007 et 2012, à comparer aux 2,7 Mds de CA sur la même période. Imaginez une entreprise « normale » avec de tels ratios !!!
Ce que TripAdvisor™ dit à ses actionnaires
TripAdvisor™ se positionne comme l’endroit où un internaute planifiant un voyage peut tout faire :
- dream : rêver
- plan & book : planifier et réserver
- on the trip : agir pendant son voyage, notamment avec les applications mobiles
- share : partager avec ses amis tout au long du processus, depuis la phase de recherche jusqu’à l’après séjour
Euh... on ne trouve pas ici l’idée maîtresse de communauté, hormis la communauté des actionnaires de TripAdvisor™. Ce terme « communauté » ne sert en fait qu’à être distribué aux badauds qui du coup baissent la garde et deviennent de gentils pourvoyeurs de cash.
Côté chiffres, la présentation aux investisseurs des résultats du 2e trimestre 2013 mentionne :
- 30 pays, 21 langues
- 725 mille hébergements : hôtels et autres
- 1,3 million de restaurants et 300 mille attractions
- 220 millions de visiteurs uniques
- 53 millions de membres enregistrés
- 100 millions de contributions
- 70 contributions par minute
- 50 millions de téléchargements d’application mobile
- 79 millions de visiteurs uniques sur appareil mobile
La présentation des résultats du 2d trimestre 2013 présente une galaxie incomplète des sites et portails. Il y manque notamment les dernières acquisitions du site comme TinyPost, CruiseCritic, Niumba ou GateGuru (cf. notre article de juin 2013) :
Ce que TripAdvisor™ ne dit à personne
TripAdvisor™ soutient que les avis sont filtrés et qu’un certain nombre d’entre eux sont éliminés avant publication ou même après. C’est vrai qu’il existe des filtres, surtout côté hôtel, car même un hôtel à l’identité certifiée parvient à se faire "modérer" facilement. Mais en fait, quel est le niveau exact de la purge côté clients ?
TripAdvisor™ a annoncé avoir passé les 100 millions de contributions le 12 mars 2013. TripAdvisor™ déclare recevoir plus de 70 contributions par minute, soit environ 3 millions par mois. 5 mois après, TripAdvisor™ devrait donc avoir passé les 115 millions d’avis. Nombreuses sont les entreprises qui seraient fières de communiquer sur une augmentation de leur contenu de 15 % en si peu de temps, comme par exemple lors de n’annonce des résultats trimestriels aux actionnaires. Mais en fait ce mot « contribution » regroupe d’une part les avis et d’autres parts les forums, mais essayez donc de connaître la part de chacun…
Mettre en place la vérification systématique du séjour, un des points sur lequel le groupe de travail de la norme AFNOR a tenté de faire le forcing sans succès, serait une véritable catastrophe pour TripAdvisor™ qui passerait de 70 contributions par minute à pas grand chose. Imaginez l’écroulement du château de carte, avec à la clé un effondrement des revenus, un effondrement du cours de bourse... Maintenir le curseur du volume d’avis est donc un point essentiel pour TripAdvisor™, bien plus que celui de la qualité. Ceci dit, la solution "Avis Express" peut aider TripAdvisor™ à régler son problème avec la bénédiction aveugle (pour ne pas dire de gros mot) des hôtels indépendants et surtout des chaînes comme Accor ou Louvre.
En pratique
Quand un internaute dépose un avis sur TripAdvisor™ à propos d’un établissement, cet avis vient principalement ajouter du contenu textuel à TripAdvisor™, les contenus photos et vidéos étant moins nombreux. À partir de là, la page TripAdvisor™ de l’établissement en question s’étoffe et TripAdvisor™ détermine la note moyenne de l’avis, puis détermine/modifie la note moyenne de l’hôtel puis enfin détermine/modifie le classement de l’établissement dans sa ville et dans sa région par un algorithme secret. On peut comprendre que TripAdvisor™ ne veuille pas révéler sa recette à l’instar de La vache qui rit®, sauf qu’il ne s’agit pas d’un produit dont TripAdvisor™ assumerait la responsabilité (elle est rejetée sur les hôtels) en complément de la jouissance (euh... pas touche à mon blé) : on parle d’entreprises tierces, de personnels tiers, de patrimoines tiers, de sueur tierce... qui chacun séparément et encore plus quand on les examine comme un tout méritent un traitement transparent. C’est d’ailleurs un des axes de la fameuse norme AFNOR à propos des avis de consommateurs : c’est au client d’attribuer lui-même une note globale et non pas à une machine de la déterminer arbitrairement.
Cet internaute peut être n’importe qui, y compris l’hôtelier lui-même ou une entreprise mandatée. Quant au contenu, il peut être positif, moyen ou négatif. Il y a quelques jours Rémi Ohayon, le patron épicurien des Ateliers Apicius et autres sociétés révélait une présumée « magouille » de la part du Moulin de Saint Vérand (cf. article du blog ADN) et qui aurait consisté à se faire encenser par quelques internautes qui au passage auraient descendu en flèche les concurrents. Depuis le Moulin de Saint Vérand a été châtié par TripAdvisor™ en perdant plus d’une centaine de places dans le classement à 135 sur 198. Mais au fait, TripAdvisor™ est-il Dieu pour pouvoir punir sans jugement et surtout sans règle ni code ? Dans la vraie vie, personne n’accepterait qu’une entreprise privée, qui plus est étrangère, puisse punir ad vitam aeternam une personne physique ou morale présumée coupable. Dans la vraie vie, nous avons au fil des siècles et des civilisations mis en place une justice qui est la seule à pouvoir juger de la culpabilité et surtout la seule à avoir le droit de condamner. Ceci dit au pays de Guantánamo on s’assoit facilement sur les droits et surtout sur le droit quand il s’agit de celui des autres. C’est sûr que Christiane Taubira ne risque pas d’être embauchée par TripAdvisor™ !
Revenons à nos moutons : voici donc notre page TripAdvisor™ qui s’enrichit de contenu récent et qui prend du galon sur ce $$$cher$$$ moteur de recherche Google. Plus l’avis est mauvais, meilleure est la position de la page TripAdvisor™ sur la requête « nom commercial de l’hôtel ». Remuer la merde d’origine inconnue est infiniment plus facile que reproduire la vérité traçable. Et oui, souvenez-vous que cet internaute peut être n’importe qui et surtout pas un client. Son seul impératif est de donner une adresse email et un pseudo. Quelques hôteliers complices nous avaient aidé il y a quelques mois à mettre en ligne de véritables faux avis certifiés. Sans vouloir dévaloriser l’aide de ces quelques hôteliers, un enfant de 5 ans parviendrait à reproduire ce qu’ils et elles ont fait pour déjouer les formidables remparts insurmontables de l’algorithme made in TripAdvisor™.
Cette page ayant du contenu frais et ayant naturellement pris du galon sur Google n’en est que plus visitée. Voici un bref résumé de ces sources :
- sources qui paraissent logiques :
- membres et internautes déjà venus sur le site
- internautes qui cherchent cet hôtel en particulier
- internautes qui cherchent un hôtel en général : par la région, par la ville. TripAdvisor™ est naturellement bien classé en SEO mais aussi en SEM
- recommandations de leurs amis qui ont déposé un avis sur TripAdvisor™
- sites et portails qui parlent de destination et qui reprennent tout ou partie du contenu de TripAdvisor™
- sources qui sont moins « logiques »
- offices de tourisme qui reproduisent du contenu de TripAdvisor™ : pourquoi ? N’ont-ils pas la connaissance du tissu local ?
- chaînes hôtelières et Roomkey : les chaînes envoient du trafic chèrement acquis à TripAdvisor™ qui « attaque » le client comme à son habitude avec des popups et bandeaux. Certaines chaînes comme Louvre sont parvenues à brider le contenu TripAdvisor™ et surtout à empêcher l’internaute de basculer vers TripAdvisor™ et donc vers les OTAs, mais elles représentent la minorité.
- hôtels indépendants : des hôtels indépendants en font de même sans pour autant avoir les moyens de brider quoi que ce soit... Ce lien sortant vers TripAdvisor™ est installé sur le site web de l’hôtel, mais aussi grâce au fabuleux onglet TripAdvisor™ sur la page Facebook de l’hôtel
Trafic = pognon
Une fois ce trafic acquis, voici TripAdvisor™ qui monétise ce trafic de plusieurs manières :
- source N°1 (Click-based advertising) : 77 % des revenus en 2012 (soit 588 M$) étaient issus des revenus au clic. Avant le basculement vers la fonction métamoteur, quand l’internaute cliquait sur « voir les prix » en ayant laissé toutes les cases cochées, chaque distributeur présent sur la page payait quelques centimes à TripAdvisor™. Le changement de cap donne à priori les mêmes résultats financiers tout en étant de meilleure qualité pour l’hôtel
- source N°2 (Display-based advertising) : 12 % des revenus (soit 94 M$) en 2012 étaient issus des publicités d’affichage « classiques » (cf. image ci-après)
- source N°3 (Subscription and other) : 11 % des revenus (soit 81 M$) en 2012 étaient issus des abonnements payés par les hôteliers (Business listing), alors que cette ligne de « produit » n’a été créée qu’en 2008. Au 19 février 2013, TripAdvisor™ annonçait avoir franchi le cap des 50.000 hôtels utilisant l’espace contacts, soit + 40 % en un an. Et on peut dire que TripAdvisor™ met le paquet pour convertir les hôteliers au modèle payant avec des emails et des appels téléphoniques nombreux et insistant. Même un vendeur de cuisine n’en fait pas autant ! Il faut dire que gagner 81 M$ pour indiquer 50.000 numéros de téléphone, 50.000 adresses email, 50.000 sites web et 50.000 promos, c’est plutôt bien vendu (1.620 $ en moyenne en 2012, ce qui est inférieur à la réalité puisque le cap des 50.000 souscripteurs a été franchi 50 jours après la fin 2012)...
Concrètement, voici comment faire cracher des dollars :
Dans sa présentation aux investisseurs, TripAdvisor™ a pour objectif d’augmenter l’entonnoir de trafic aves 5 sources :
- marketing de marque(s) : syndication (RSS), CRM (envoi individualisé et ciblé) et marketing hors ligne
- navigation directe
- partenaires et référents
- SEO
- SEM : TripAdvisor™ achète des adwords chez Google sur des mots génériques mais également sur des noms commerciaux (cf. image ci-après)
- bizarrement rien sur le « social »
Social = trafic = super pognon
S’il y a un domaine ou TripAdvisor™ a montré d’énormes capacités d’adaptation et surtout d’innovation, c’est justement sur le côté social. Bon nombre de chaînes hôtelières feraient bien d’en prendre de la graine.
TripAdvisor™ a été l’application Facebook numéro 1 en décembre 2012 (Source TripAdvisor™).
En donnant aux internautes la possibilité d’épingler sur une carte les villes et attractions visitées, TripAdvisor™ fait interagir les amis. En poussant les internautes à se connecter grâce au Facebook-connect, chaque internaute voit s’afficher les interactions de ses amis, les hôtels préférés de ses amis... Le viral fonctionne à plein régime...
En donnant aux hôteliers la possibilité de diffuser « leurs » avis sur leur page Facebook, TripAdvisor™ gagne du trafic sans effort puisque chaque page FB équipée de l’onglet magique va rabattre du trafic vers la Matrice qui va alors redistribuer ce trafic au gré des plus offrants. À ce jeu-là, un hôtel indépendant a peu de chance, même lorsqu’il souscrit à TripAdvisor Connect.
Dès l’instant où un internaute socialise avec TripAdvisor™, il va devenir le gibier. S’il a visité la page d’un hôtel, il va recevoir des emails disant « ben alors mec, kes’t’attend pour booker ? » S’il retourne sur TripAdvisor™, il va revoir cet hôtel s’afficher sur le côté, dans les suggestions, etc... Même si le mot « traque » n’est pas officiellement une pratique du marketing moderne, il est faible en comparaison des assauts répétés que fait subir TripAdvisor™ à l’internaute.
Métamoteur = maxi pognon
La fonction métamoteur permet de montrer au client la liste des hôtels disponibles à la date souhaitée. Sous prétexte de rendre un immense service au client, c’est surtout à lui-même que TripAdvisor™ rend service au client car chaque hôtel présenté va permettre de générer des clics payants. Sur la liste ci-dessous, l’option « afficher les indisponibles » est par défaut décochée ce qui veut dire que parmi ces 10 premiers hôtels, 4 ne seraient tout simplement pas affichés alors qu’ils sont respectivement, 1er, 4e, 5e et 9e… Comparez avec la recherche en bas de page, c’est la même à la différence près que la case « afficher les indisponibles » est cochée.
Ce que TripAdvisor™ a perdu gagné en basculant de son ancien modèle à celui-ci est simple :
auparavant sur la fiche d’un hôtel, l’internaute cliquait sur « voir les prix » et voyait s’afficher plusieurs popups, chaque popup ayant généré son revenu au clic. Sur une recherche par ville, le bouton « voir les prix » faisait sortir l’internaute et TripAdvisor™ ne gagnait donc qu’un seul clic, certes plus gros que depuis une page d’hôtel, mais unique quand même. Et surtout, TripAdvisor™ voyait partir ses internautes plus vite.
aujourd’hui, sur la fiche d’un hôtel, TripAdvisor™ ne gagne en général qu’un seul clic depuis cette page d’hôtel. Mais c’est sur les pages de villes ou de région que TripAdvisor™ se refait : l’internaute n’hésite plus à cliquer sur plusieurs hôtels pour comparer les prix. Ce sont donc assez naturellement plusieurs clics qui sont générés depuis ces pages de destination. L’internaute restant plus longtemps car n’étant poussé vers l’extérieur que pour l’ultime phase de réservation, TripAdvisor™ augmente mécaniquement son nombre de pages vues et la durée moyenne de visite
Comment TripAdvisor™ transforme de braves hôteliers en moutons écervelés ?
L’ego, toujours l’ego. Flattez les hommes et ils se plieront en quatre pour vous. À ce jeu-là, les femmes tombent en général moins dans le panneau. C’est sûr qu’elles ont plus l’habitude des dragueurs un peu lourds…
La recette miracle de l’algorithme de TripAdvisor™ donne énormément plus d’hôtels bons ou très bons que de moyens, mauvais ou même « horribles ». C’est normal parce que dans la vraie vie les moyens et les mauvais hôtels sont rares, surtout en France où la moquette murale ou le formica vintage ont été éradiqués depuis des lustres. En fait pour changer les proportions de bons versus les mauvais, nul besoin de faire des travaux ni former le personnel des hôtels. Il suffit de modifier l’algorithme de TripAdvisor™ et hop le tour est joué, ni vu ni connu. Ceci dit, les éminent(e)s syndicalistes français qui ont concocté copié-collé les excellentissimes normes de classement gentiment mises à disposition par le généreux Accor ont agi de même puisque d’un coup tout Ibis, même le plus usé à la corde, est passé de 2 à 3 étoiles. L’art de l’illusion consiste en fait à savoir détourner l’attention :)
Le certificat d’excellence a été distribué à environ 10 % des établissements, soit entre 70.000 et 75.000 établissements dans le monde, rien que ça. Youpi ! Bravo ! On en serait presque à embrasser le crâne de Barthez en chantant « I will survive ». Waouh, c’est tellement génial d’obtenir ce certificat comme plusieurs dizaines de milliers d’autres hôtels !!! Jacques Martin peut être content de voir que son concept de l’École des Fans a été industrialisé. Espérons que ses ayant droits touchent des royalties ! Comme l’écrivait si bien Pagnol, l’autosatisfaction bedonnante ne date pas d’hier... Voici donc nos vaillants récipiendaires qui se transforment en chasseurs émérites posant héroïquement en photo à côté du cadavre de ces pauvres bartavelles alors que grand Dieu on ne les y aurait jamais pris. Il suffit de voir le nombre de façades d’hôtels ou de restaurants qui s’ornent de ce magnifique trophée en vert massif pour constater impuissant l’épidémie de concupiscence qui frappe d’un coup ces braves hôteliers ou restaurateurs, comme si l’apposition du vert massif en façade de l’hôtel provoquait à elle seule la même réaction que celle d’un adolescent feuilletant Playboy. Quant aux sites Internet des hôtels, on peut en faisant quelque effort y trouver une demi circonstance atténuante à la condition expresse que l’hôtel ne pousse pas le vice jusqu’à renvoyer ses visiteurs vers la Matrice. Mais non, la tentation est diaboliquement tentante d’aller montrer à ses visiteurs comment le gentil TripAdvisor™ est bon et grand avec lui. Quand l’hôtel est vraiment excellent, vous savez celui qui a obtenu le véritable certificat unique qui récompense les véritables « meilleurs » (meilleurs suivant TripAdvisor™ ce qui n’engage que TripAdvisor™), le Traveler’s Choice, envoyer ses visiteurs à TripAdvisor™ ne présente pas beaucoup de risques, ou disons plutôt moins que les autres. Pour les 99,5 % restant d’hôteliers normaux et très majoritairement honnêtes, c’est comme mettre cinq balles dans le barillet et jouer à la roulette russe en priant pour tomber sur la chambre vide : le revolver gagne toujours ! Il suffit pourtant de peu de recul pour percuter :).
Ceci dit, pour leur faire croire que leur sort de taulier hôtelier compte à ses yeux, TripAdvisor™ a mis en place un outil contre le chantage à l’avis, pompeusement appelé chantutation comme si le chantage avait plus ou moins de valeur suivant le domaine où il est pratiqué, par lequel un hôtel va déclarer un chantage de la part d’un client. En fait dès qu’un hôtel a identifié un client grincheux, tout particulièrement quand un problème est survenu, il suffit d’aller lui couper l’herbe sous le pied en déclarant un pseudo-chantage. Enfin, faudrait quand même pas prendre la super-équipe anti-fraude de TripAdvisor™ pour des prunes !
Avis Express, le cheval de Troie
Comment qualifier un programme qui consiste à faire donner à TripAdvisor™ la liste des adresses emails de tous ses clients ? Il consiste à transférer son fonds de commerce à une entreprise, étrangère au demeurant, dont l’appât du gain n’est plus à démontrer.
Le but de la manœuvre est angélique, il consiste à écrire pour le compte de l’hôtel aux anciens clients en leur demandant de déposer un avis sur TripAdvisor™. Bien évidemment, l’hôtel dispose d’un tableau de bord pour savoir en temps réel combien d’avis sollicités ont été réellement générés. De quoi rendre de nombreux hôteliers accros au jeu qui consiste à pousser le ratio toujours plus haut…
TripAdvisor™ assure ne rien faire d’autre avec ces emails que contacter les clients pour obtenir un avis. Le truc, c’est que pour déposer un avis, un internaute devient membre. Une fois devenu membre, cet internaute est donc sollicité, tracé, traqué, (dé)socialisé par l’impitoyable machine de guerre TripAdvisor™. Le client de l’hôtel qui ne connaissait pas ou ne voyait pas l’intérêt à poster un résultat se laisse plus facilement tenter et devient un énième numéro pour TripAdvisor™ ou plutôt un énième multiple de 27 dollars de bénéfice net.
Grâce à vous, Mesdames et Messieurs les hôteliers qui utilisez Avis Express, TripAdvisor™ gagne une légitimité qui lui coûterait trop cher à acquérir. Il va pouvoir indiquer sur l’avis un texte qui pousse le lecteur à croire que l’avis émane d’un vrai client, texte qu’il est facile de modifier pour un jour prochain ajouter « avis certifié » :
Non seulement les avis sollicités par les hôtels eux même vont augmenter plus rapidement le volume d’avis de TripAdvisor™, mais en plus ces avis vont être facilement « certifiés ». Plus d’avis et plus d’avis « certifiés » sont à coup sûr un bon moyen pour TripAdvisor™ d’augmenter prochainement ses tarifs. Ben oui, faut bien rembourser les investissements faits par les autres ! Pour les hôteliers, c’est le double effet Kiss-Cool :) :
on donne son fonds de commerce à TripAdvisor™
on donne à TripAdvisor™ toutes les raisons d’augmenter ses tarifs pour mieux se faire plumer, soit en direct, soit au travers des OTAs qui répercuteront sur les hôtels l’augmentation du coût du clic
En fait TripAdvisor™ ne fait (à priori) rien des adresses emails des clients qui n’ont pas répondu à la sollicitation. Il serait intéressant de mener le test. Si un ou plusieurs hôteliers veulent faire l’expérience, TH s’engage à en publier les résultats, quelle que soit leur direction.
Quand on voit que le Fouquet’s Barrière pousse ses clients vers TripAdvisor™, on peut se demander « mais à quoi pense le patron du marketing en envoyant ses clients vers un tiers assoiffé de clics ? » ou bien « les palaces ont-ils besoin de TripAdvisor™ pour montrer qu’ils sont excellents dans leur domaine ? » (vidéo de la Directrice Hébergement du Fouquet’s Barrière lors du MasterClass TripAdvisor du 12 juin 2013 à Paris) :
TripAdvisor Connect, miroir aux alouettes
Voici une belle invention pour assujettir les hôteliers à verser leur obole à TripAdvisor™ en complément du business listing.
Ce service à trois niveaux permet aux hôteliers indépendants et aux chambres d’hôtes de diffuser leur tarif dans le métamoteur de TripAdvisor™, soit quand l’internaute recherche de la disponibilité sur la ville, soit quand l’internaute recherche de la disponibilité sur un hébergement spécifique.
Les 3 niveaux sont :
- TripAdvisor Connect : intégration sui se limite à la diffusion de tarifs sur le métamoteur
- TripAdvisor ConnectPlus : intégration métamoteur + rapport automatique de commentaires dans le moteur de réservation
- TripAdvisor Connect Premium : intégration métamoteur + rapport automatique de commentaires dans le moteur de réservation + rapport d’activité afin de mesurer le ROI
Quitte à utiliser un tel système, un outil de mesure du ROI paraît essentiel, sauf à débourser de véritables fortunes à tenter d’acquérir des clients.
Le seul problème de Direct Connect, c’est que les OTAs passent en premier. Micros a récemment publié une étude sur le sujet. Il en ressort que le lien de l’hôtel se retrouve souvent en fin de liste ou même dans le « 5 more sites » comme dans l’image ci-dessous :
Cette étude a également montré depuis l’introduction de la fonction métamoteur une chute considérable du trafic des sites web des hôtels ayant souscrit depuis 2012 à cette offre TripAdvisor™ comme le montre le graphique ci-dessous (réalisé sur 104 hôtels par Micros entre fin 2012 et juin 2013)
En France, il ne manque pas d’hôtels qui ont « débranché » l’option depuis leur moteur de réservation car elle génère des coûts sans générer suffisamment de réservations directes. Si une résa coûte 30 % rien qu’en PPC, pourquoi ne pas passer tout simplement par les OTAs. Enfin tant que TripAdvisor™ continue de favoriser les OTAs au détriment des hôtels. Si l’algorithme qui détermine l’affichage se base sur le volume de clics générés, c’est évident qu’un Booking va générer infiniment plus de clics qu’un hôtel indépendant !!!
Au final le véritable intérêt de TripAdvisor Connect pour un hôtel serait qu’il publie ses prix quand aucun OTA n’y est présent, mais justement si aucun OTA n’y est, pourquoi payer un tiers pour récupérer son propre trafic ? Dans cette configuration, le Business Listing présente un réel intérêt puisqu’il permet d’avoir chèrement un lien vers son propre site et ses promos.
TripAdvisor Insights, outil de propagande
À grand renforts de copiés-collés dans la presse spécialisée, TripAdvisor™ a révélé au monde son immense générosité qui consiste à regrouper en un point certaines ressources. Voici un extrait du communiqué de presse :
« En tant que plus grand site de voyage au monde, nous permettons aux experts de l’industrie d’avoir un accès sans précédent à des données révélant des tendances », explique Alison Copus, VP Marketing, TripAdvisor for Business. « Nous espérons que cette nouvelle ressource devienne indispensable pour les professionnels du marketing en ligne et tous ceux qui veulent en savoir plus sur ce secteur. Les visiteurs du portail pourront accéder aux meilleures pratiques des stratégies marketing, aux articles d’experts, aux études de cas avec des témoignages de professionnels du tourisme ainsi qu’aux dernières tendances délivrées par les autorités de l’industrie du voyage, tels que les professeurs de l’Université Cornell. L’objectif est d’informer et d’inspirer à la fois. »
Au passage on remarque l’auto-proclamation de plus grand site de voyage au monde pourtant la taille, un complexe masculin, compte peu sur Internet. On pourrait parler de plus complet, de plus de contenu, de plus de faux avis, mais pas de taille.
TripAdvisor™ regroupe en fait en un lieu beaucoup d’informations essentiellement orientées autour de TripAdvisor™ et met évidemment en avant ses produits payants.
Quand on lit la page intitulée « Lutte contre la falsification des avis », on croirait lire la prose de politiciens face à n’importe quel problème dont il ne savait strictement rien 30 secondes auparavant :
- on analyse : NSA, SVR et Mossad peuvent aller se rhabiller à côté de ce que TripAdvisor™ a mis en place
- on écoute : mais bon comme on sait qu’on est
une passoireperfectible, onmet la communauté sur table d’écouteécoute la communauté, dès fois qu’ils repèreraient un faux avis avec un gros nez de clown - on identifie : on va même jusqu’à inciter les hôtels à acheter de faux avis pour pouvoir mieux punir ces scélérats ! Çà c’est très honnête, c’est sûr !
- on punit : ou plutôt on se déchaîne avec suppression des avis « frauduleux », baisse du ranking, ajout du bonnet d’âne et enfin action en justice, enfin ça c’est la théorie parce que TripAdvisor™ n’a pas attaqué beaucoup d’hôteliers, ça se saurait, ou alors c’est que TripAdvisor™ a perdu... Mais pourquoi ne pas simplement les supprimer du site et leur rendre leur liberté ? Sans doute peur de l’épidémie d’exclusion...
Ailleurs les commissions paritaires fonctionnent, mais non pas chez TripAdvisor™. Bien trop cher, il faudrait une salle et en plus il faudrait filer du café gratuit !!!
Les hôtels, nouveaux rabatteurs de trafic
Voici les outils qui permettent aux hôtels de gentiment et surtout gratuitement envoyer du trafic chèrement acquis au gentil TripAdvisor™ :
- intégration des avis et/ou des badges sur le site officiel de l’hôtel
- onglet TripAdvisor™ sur la page Facebook de l’hôtel
- envoi par TripAdvisor™ d’emails sollicitant un avis
Pour résumer la situation :
- un hôtel paie cher son site web et son référenceur pour acquérir du trafic
- parfois cet hôtel a même fait du SEM sur sa propre marque afin de passer devant les OTAs
- une fois qu’il a (chèrement) attrapé un internaute, il l’envoie gentiment à TripAdvisor™
- pour récupérer cet internaute qui au passage se transforme en client, il va devoir :
- soit payer TripAdvisor™ au clic
- soit payer une commission à un OTA qui sera de toutes les façons favorisé par TripAdvisor™
Il faut vraiment beaucoup de bonne volonté pour essayer de trouver ne serait-ce qu’un seul avantage au fait d’envoyer ses clients à TripAdvisor™. Quand les hôteliers en auront marre de se faire plumer vivant, peut-être réfléchiront-ils...
Profiter gratuitement du système
Être hôtelier et ne pas profiter gratuitement du système s’appelle se tirer une balle dans le pied. C’est gratuit alors n’hésitez pas en reprendre. Voici quelques astuces déjà décrites sur TH ou ailleurs :
- prendre possession de sa page « propriétaire »
- mettre à jour ses coordonnées
- ajouter des photos. Certains hôteliers ont systématiquement ajouté à toutes photos diffusées hors de leur propre site web avec un « © monsite.com »
- suivre l’évolution des avis en souscrivant au service d’alerte gratuit
- profiter de chaque avis pour diffuser un message supplémentaire : on a rénové ceci, on va faire cela, réserver en direct c’est X % d’économie, marteler de réserver en direct
- maintenir ses coordonnées régulièrement à jour, renouveler les photos, répondre aux avis… pour occuper le terrain
Voir par exemple nos articles « A qui appartient l’avis du client ? » ou « Commentaires clients : à faire, à ne pas faire, aller plus loin ».
Le mot à la mode : algorithme
À force d’entendre tout le monde utiliser ce terme, faisons un peu de révision : le Larousse en dit "Ensemble de règles opératoires dont l’application permet de résoudre un problème énoncé au moyen d’un nombre fini d’opérations. Un algorithme peut être traduit, grâce à un langage de programmation, en un programme exécutable par un ordinateur. Wikipédia en dit "Un algorithme est une suite finie et non ambiguë d’opérations ou d’instructions permettant de résoudre un problème".
Un avis de consommateur serait-il un problème alors ? Et si le problème était justement de ne pas savoir les analyser correctement...
Au final on pourrait synthétiser comme cela : l’algorithme de TripAdvisor™ consiste à convertir des mots, simples au demeurant, en nombres figurant devant le signe « $ ».
Voici un exemple typique (image ci-dessous) qui démontre l’absurdité de l’algorithme made in TripAdvisor™ : le client donne un bon titre, a de bons commentaires et si on fait la moyenne arithmétique des 5 notes données par le client on arrive à 3,8 sur 5, aucunement 2 sur 5 ! Sans doute que l’algorithme made in TripAdvisor™ a voulu pénaliser les phôttes !
En fait l’algorithme made in TripAdvisor™ sur la page de chaque hôtel est justement ce qui l’empêche de se faire certifier AFNOR. Imaginez un peu le séisme que provoquerait un changement de méthode de calcul dans les notes données par chaque internaute, avec un impact sur la note moyenne d’un hôtel. Imaginez l’impact sur le classement des hôtels, tout particulièrement dans des villes très concurrentielles : les premiers ne seraient plus forcément les premiers, des moyens deviendraient bons, des bons deviendraient moyens, peut-être même que des « horribles » se contenteraient d’être « mauvais » ou même « moyens », etc... Qu’adviendrait-il des 100 millions de contributions déjà collectées ?
Au-delà de cet algorithme sur chaque page d’hôtel, TripAdvisor™ utilise un autre algorithme lui aussi totalement opaque pour décider qui est premier et qui est dernier. L’opacité est encore plus totale quand on sait que d’autres algorithmes ont décidé quels avis devaient être publiés et quels autres ne le devaient pas...
Qui a décidé que TripAdvisor™ dominait le monde (du voyage numérique) ?
Dans le monde, il existe des positions dominantes :
- Google domine la recherche mondiale avec environ 60 % à l’échelle de la planète et plus de 90 % dans un certain nombre de pays dont la France (sources multiple dont Comscore)
- Microsoft domine le monde des ordinateurs personnels, PC fixe ou PC portable (sources multiples)
- Android domine le marché des smartphones avec un taux de pénétration supérieur à 50 % du marché (les sources sont nombreuses entre Comscore, JDN...)
- Facebook domine l’Internet social avec 1 milliard de membres (source Facebook) à comparer aux 2,7 milliards d’internautes (source UIT-Union Internationale des Télécommunications), soit environ 37 %
- Booking domine les OTAs pour la partie hébergement (source Phocuswright). En tous les cas, Booking domine l’affichage des noms commerciaux des hôtels sur ce $$$cher$$$ Google quand on parle de SEM ou PPC ou adwords
- ...
Face à cela, ON a décidé que TripAdvisor™ dominait le monde du voyage dans le monde. Le « on » est souvent l’auto-proclamation de TripAdvisor™, reprise à tue-tête par une horde de copieurs-colleurs tous contents de reproduire une information si précieuse. Eh oh !
- il ne manque pas de pays où TripAdvisor™ n’est pas le pemier site de voyage (en nombre de visites), par exemple la France où Voyages-Sncf fait « seulement » 2,3 fois mieux que TripAdvisor™ (source Journal du Net). Ailleurs des Booking.com, Expedia, Agoda... font parfois mieux, sans compter des marchés particuliers comme la Chine, la Russie ou le Brésil qui ont leurs propres sites de références
- TripAdvisor™ pèse 53 millions de membres, ce qui signifie que 2,650 milliards d’internautes ne le sont pas. Peut-être devrait-on lancer une grande campagne d’information financée avec des fonds ONUsiens à destination de ces 2,650 milliards d’internautes (incultes NDLR) qui ne sont pas (encore) membres de TripAdvisor™
- avec 100 millions d’avis pour 750.000 établissements, on obtient une moyenne de 133 avis accumulés entre 2000 et 2013, soit environ 10 avis par an, ce qui n’est pas tout à fait réaliste puisque le rythme s’accélère. Heureusement pour eux, ces établissements reçoivent d’autres clients que ceux ayant laissé un commentaire. En 10 ans, un hôtel de 30 chambres, 60 % d’occupation et avec des moyennes de 1,5 personnes par chambre et 1,8 jours de durée moyenne a reçu environ 30.000 personnes. 133 / 30.000 = 0,4 % des clients. Waouh, very impressionated !
- avec ses 500.000 nuitées réservées chaque jour (env. 182 millions de nuitées par an, source Booking), l’ogre Booking rattrape rapidement son retard. En août 2013, Booking revendique 23 millions d’avis, mais surtout de vrais avis (mwouais) ou plutôt d’avis faisant suite à une réservation
On peut également se référer à l’étude de Coach Omnium « Les commentaires de clients sur Internet » d’avril 2013, la seule du genre et surtout l’une des seules mentionnant sa méthodologie non raëlienne. Les clients interrogés déposent à 39 % sur Booking et 20 % sur TripAdvisor™. Et ceci ne concerne que les 12 % de clients qui déposent parfois ou souvent des avis sur les sites. C’est sûr qu’à 19 % du premier, TripAdvisor™ domine les suivants !
On peut dire sans se tromper que TripAdvisor™ fait partie des sites de voyages les plus visités au monde. On peut également dire que TripAdvisor™ contient le plus grand nombre d’avis concentrés en un point, mais être le premier ne signifie pas dominer, surtout quand il est impossible de dresser une liste exhaustive des sites contenant des avis de voyageurs, entre les livres d’or, les sites des hôtels, les pages Facebook des hôtels, les OTAs, les sites généralistes avec une branche UGC, les sites UGC généralistes, les forums ouverts, les forums privés, les groupes de discussion, les métamoteurs... sans oublier Google ou Facebook ainsi que tous les autres réseaux sociaux ! Qu’on nous montre une liste exhaustive de sites avec des statistiques réelles en face et à partir de là on verra ce que pèse vraiment TripAdvisor™.
Et si on parlait de domination hôtel par hôtel ?
Une vraie méthode de calcul du poids de TripAdvisor™ dans ses avis consisterait pour chaque hôtel à répertorier ses avis sur différentes plateformes et surtout sur son propre site. Souvenez-vous ne notre récent article « A qui appartient l’avis du client ? ».
C’est aux hôteliers qu’il appartient de s’approprier les avis de LEURS clients, à personne d’autre. Encore faut-il le faire de manière crédible, avec un outil tiers de confiance qui répond aux exigences certes encore trop peu contraignantes mais pourtant réelles de la norme AFNOR.
Rendre et/ou maintenir TripAdvisor™ minoritaire est à la portée de tout hôtelier qui se prend en main. Cette prise en main va montrer aux clients que les avis sont importants à ses yeux, mais va aussi montrer que l’hôtelier respecte une norme à laquelle de gros sites comme TripAdvisor™ ne risquent pas de se plier de sitôt. Quant aux clients qui sont initialement passés par TripAdvisor™ pour trouver l’établissement, ils seront rassurés de voir plus d’avis, cette fois certifiés, rassemblés en un point. Et oui, n’oubliez pas que les clients ne se contentent pas de visiter un seul et unique site avant de réserver. Ces mécréants osent même aller voir ailleurs que sur TripAdvisor™.
Dans la mesure où TripAdvisor™ concentre naturellement du trafic, continuer à vérifier et répondre à ses avis sur TripAdvisor™ n’est que du bon sens. Il ne faudrait pas faire dire à cet article ce qu’il ne dit pas. Profitez du système quand c’est gratuit, abusez-en même !
Le traitement réservé aux mauvais
Avant de commencer, il faut se souvenir que le qualificatif « horrible » dont sont affublés certains hôtels est le fruit de l’algorithme made in TripAdvisor™. L’avis « horrible » ne reflète aucunement le sentiment général de l’internaute ayant déposé un avis puisque ce sentiment général a été calculé par une machine ! Par-dessus ce premier classement dans la catégorie "horrible", un second algorithme est venu déterminer lequel était plus moins que l’autre qui était moins mais en tous les cas plus que le troisième.
TripAdvisor™ s’est souvent fait l’écho des pires des pires des lieux cauchemardesques. Dans nos civilisations judéo-chrétiennes, se moquer du plus faible et même pire écraser du pied le plus faible pour grimper plus vite au firmament n’est pas une pratique moralement acceptable, même si ces hôtels sont effectivement cauchemardesques, ce qui n’est pas forcément avéré. Pour le savoir, encore faudrait-il s’en assurer. Quand on prend par exemple les derniers hôtels du classement des hôtels parisiens ouverts, le nombre d’avis ne vole pas haut, souvent inférieur à 50 avis là où la moyenne générale est de 133. Peut-on estimer que ce faible nombre d’avis est représentatif ?
Cette recherche du sensationnel est du niveau des plus purs tabloïds anglais de la belle époque... TripAdvisor™ a depuis 2011 cessé de balancer cette liste à la presse qui se régale du sang des autres sans vouloir se salir les mains. Rares sont en effet les journalistes à oser franchir le pas de ces soi-disant cloaques, à l’instar de ce courageux journaliste du New York Post ayant osé franchir la porte du pire hôtel new yorkais ou de celui du Daily Mail visitant le même hôtel. Combien d’autres ont été vérifiés sérieusement, tout particulièrement quand le nombre d’avis est inférieur à 10 ?
On ne peut qu’être affligé de voir des magazines consacrer leurs unes et leurs pages à reprendre (bêtement) les classements TripAdvisor™ sans avoir pris la peine de vérifier quoi que ce soit. Le récent article de Slate intitulé « les 10 hôtels les plus horribles de France selon TripAdvisor » est dans la lignée. Le seul travail de son journaliste a été de compiler des chiffres sur Excel et de faire des captures d’écran. On peut se douter que ces hôtels ne sont pas des palaces, mais peut-on se fier à moins de 40 avis pour chacun d’entre eux, les 3 premiers ne dépassant même pas les 20 avis, là où d’autres sites en diffusent bien plus et surtout bien plus variés que dans la seule rubrique « horrible ». N’oublions pas que la qualification « horrible » ne reflète pas l’avis du consommateur mais reflète l’interprétation algorithmique par TripAdvisor™ des commentaires du client.
Le traitement réservé aux bons
Avant de parler des meilleurs, il faut se souvenir que le qualificatif "excellent" n’est pas le reflet du sentiment global (et sincère) de chaque client, mais uniquement le résultat du calcul algorithmique d’une machine d’une part et que d’autre part un second algorithme est venu établir un classement. Vu l’opacité de la recette ancestrale, on ne peut pas s’empêcher d’imaginer les questions du type "Dis m’sieur trip-à-deux-viseurs, c’est où qu’on paye pour gagner des places ?"...
Du côté des têtes de classe, là aussi le traitement peut paraître léger. Sur les 10 premiers hôtels parisiens, on constate un nombre d’avis compris entre 246 et 927, soit presque du simple au quadruple. Quand on prend celui qui en a le plus, le George V avec 927 avis pour 245 chambres dont les statistiques cartonnent comme tous les palaces parisiens, on en arrive à environ 350.000 clients en 13 ans, on arrive à 0,25 % de clients ayant laissé un avis. Même si on disait que ces 915 avis ont été cumulés sur 5 ans au lieu de 13, on arrive à 0,65 %. Mazette quelle représentativité ! C’est sûr qu’avec 0,65 % de ratio, TripAdvisor™ est fatalement dominant...
Voici une capture d’écran du 23 août 2013 concernant ces 10 meilleurs hôtels parisiens, avec en tête un hôtel de 6 chambres que l’on peut difficilement comparer avec un hôtel indépendant comme Le Six ou Le Luxembourg parc, ni encore moins comparer au Bristol, au Fouquet’s ou au George V… C’est comme si on cherchait à savoir quelle salade est la meilleure entre chaque variété de laitue, chaque variété de chicorée, sans oublier les savoureuses mâche, cresson, roquette, etc..., bien évidemment sans faire la distinction des traitements, des insecticides, des bios, de l’avancement de la saison... La meilleure sera-t-elle la plus jolie, la plus grosse, la plus tendre ou la plus croquante ? Pourquoi ne pas intégrer l’assaisonnement avec une huile de noisette, une huile d’olive ou une huile de noix ? Bref, rien n’est plus irréel que de comparer l’incomparable. On y voit au passage qu’Olotel fait toujours du bon travail ou plutôt que les responsables e-distribution des établissements concernés n’ont pas lu « Suicide (tarifaire) en bande organisée »…
Si l’internaute a eu la bonne idée de sélectionner des dates, les bons hôtels sans disponibilité sont cachés par défaut. Enfin quand on parle de non-disponible, il s’agit d’hôtels ne travaillant pas avec les OTAs ou n’y ayant plus de disponibilité, ainsi que ceux qui ne paient pas le Direct Connect. Avec le métamoteur, les bons hôtels sont eux aussi sacrifiés pour une question d’argent.
Responsabilité des faux avis
Dès qu’un avis portant de graves accusations contre des personnes est posté (harcèlement sexuel, viol, vol,…), TripAdvisor™ se réfugie derrière la liberté de parole en omettant totalement la dimension de la présomption d’innocence. Il ne manque pas d’avis dénonçant des abus sexuels ou des vols mais pour lesquels soit aucune plainte n’a été déposée, soit une plainte a été déposée et une instruction en cours. La frontière avec la diffamation est mince, tout particulièrement après que TripAdvisor™ a été prévenu par l’hôtelier. On pourrait s’attendre à une indication supplémentaire du style « une enquête de Police est en cours » quand c’est le cas, mais non. On pourrait s’attendre à une vérification plus approfondie de la part de TripAdvisor™, mais non.
Plutôt que diffuser ici une liste d’avis de ce style, voici un site anglophone anti-TripAdvisor qui en diffuse : tripadvisor-defamation.com.
Conclusion
On peut continuer à considérer TripAdvisor™ comme faisant partie du monde formidable des bisounours. Dans la vraie vie, TripAdvisor™ se positionne avant tout comme un formidable péage automatisé où chaque réservation génère plusieurs droits de passage, où chaque hôtel paie pour afficher un simple numéro de téléphone et qui n’hésite pas à utiliser les informations pas toujours très bien protégées du profil des clients sur les réseaux sociaux au service du roi dollar.
Il existe des domaines comme l’agriculture où se mettent en place des moratoires destinés à prendre du recul. Une fois que l’avis transgénique dopé au dollar aura contaminé l’intégralité des vrais avis, sans doute sera-t-il trop tard pour revenir en arrière et récupérer la confiance du client.
Et pourtant il existe d’autres façons d’exister que suivant la logique NASDAQuienne…
Dans le cadre strictement privé (voir les CGU) de la reproduction partielle ou intégrale de cette page, merci d’insérer la marque "TendanceHotellerie" ainsi que le lien https://suiv.me/3307 vers sa source
ou le QR Code accessible à l'adresse https://suiv.me/3307.qr . Voir le mode d'emploi. |
Recommander cette page
Tweet |
Les commentaires