Tempête dans un dé à coudre : Booking a presque perdu en 1re instance

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Le Tribunal de Commerce de Paris a prononcé un jugement le 29 novembre 2016 « contre » Booking. Depuis le bal des « on a gagné » est omniprésent dans le microcosme hôtelier, sauf qu’aucune publication nationale n’en a fait l’écho. C’est pourtant aux clients, et donc au grand public, qu’il faudrait faire état de cette victoire incontestable si c’en était une…
S’il y a bien un point important dans ce jugement, c’est la capacité qu’a eu Booking de repousser la décision du Tribunal de Commerce de Paris à novembre 2016 alors que son assignation par le Ministre de l’Economie datait de février 2014. Joli tour de passe-passe pour rendre ce jugement nativement obsolète. #chapeaulartiste
Kicéki avait réellement assigné Booking ?
A la lecture de ce post Facebook de l’UMIH (cf. infra), on pourrait presque croire que l’impétueux UMIH a terrassé le vil Booking. Sauf que l’UMIH est arrivé bon dernier dans la liste de ceux qui se sont ralliés au Ministre, juste à temps pour voir son nom figurer dans la liste. #ilétaitmoinsune
Voici un rappel des faits mentionnés dans ce jugement :
- En fait c’est le Ministre de l’Economie qui avait assigné Booking en février 2014 puis l’avait annoncé à la presse en novembre 2014, cf. Régulation des plateformes de vente en ligne : Arnaud MONTEBOURG assigne Booking devant le Tribunal de commerce. Cette assignation faisait suite à l’enquête lancée en 2011 auprès de la DGCCRF de l’époque, devenue depuis DIRECCTE, à l’initiative du ministre de l’époque.
- En 2014, les 3 syndicats SYNHORCAT, FAGIHT et CPIH alors rassemblés sous la dénomination GNI, se joignent à la procédure.
- En mars 2015, un jugement de procédure déclarait la juridiction de première instance française compétente en la matière. Cette décision a bien évidemment fait l’objet d’un contredit rejeté par la Cour d’Appel de Paris en septembre 2015. Bizarrement, le jugement de mars 2015 ne fait strictement aucune mention de l’UMIH ni du GNC, ce qui prouve bien que l’UMIH est loin d‘être à l’origine de l’instance. Pour rappel, la CPIH quittait le GNI début 2015 afin de rejoindre l’UMIH. On entend déjà l’UMIH dire que c’est pareil, sauf qu’à l’époque où la CPIH a rejoint la procédure, la confédération était censée être GNI, pas UMIH. A moins qu’on ne nous dise pas tout…
- Les seules audiences auxquelles l’UMIH est associé dans ce jugement sont en février et septembre 2016,
Des résultats, c’est comme la confiture : moins on en a, plus on l’étale...
En tous les cas, si quelqu’un doit s’attribuer une victoire, c’est le ministre, rien que le ministre ! #longuevieauministre
Bon alors ce jugement, keskidit ?
Haro sur les clauses de parité
Les clauses de parité de Booking sont déclarées illégales. Ça tombe bien, elles ont déjà disparu des contrats de Booking suite à l’accord devant l’Autorité de la Concurrence (cf. L’autorité de la concurrence protège Booking.com des méchants métamoteurs et des vilains hôteliers) puis la Loi Macron (cf. La loi met fin à la parité tarifaire et instaure le contrat de mandat).
On entend « ouais mais Expedia conteste la Loi Macron » (cf. Les distributeurs de voyages saisissent la Commission européenne pour qu’elle examine l’incompatibilité de la Loi « Macron » avec le droit européen). Sur le papier, oui, Expedia pourrait éventuellement obtenir gain de cause, sauf que l’épidémie d’implication des gouvernements européens dans les relations hôtels-OTAs est trop étendue pour espérer voir les clauses de parité réapparaître durablement et surtout légalement.
Marketing des clients : quelle victoire éclatante !
Les clauses interdisant de contacter le client sont déclarées illégales, ça tombe bien car elles ont elles aussi déjà disparu des contrats Booking.
Certes Booking a crypté les coordonnées des clients, mais rien n’empêche les hôtels de communiquer avec le client avant son séjour ni, lors de son séjour, de récupérer ses coordonnées et surtout son accord pour être contacté à des fins marketing. S’il y a bien quelqu’un à qui il faut demander son accord, c’est le client. #maisoùvaton
Plus sérieusement, on aurait pu attendre que les syndicats demandent à Booking de respecter les standards technologiques de la profession en matière de sécurité et d’échange de données senseibles. Ah bon, ya des standards ?
Le classement des hôtels : yen a qui ont fumé la moquette
Voici donc que les clauses qui autorisent Booking à mieux classer un hôtel qui lui alloue une commission plus importante sont déclarées illégales au motif que les pauvres hôteliers ayant souscrit au programme « hôtels préférés » ne pourraient plus être visibles si d’autres paient plus de commission. Si on résume bien, mentir au client sous couvert du programme « hôtels préférés » n’est pas grave alors que mentir au client en donnant plus de commission est un péché mortel. De qui se moque-t-on ???
Par extension, on pourrait se dire que Don Corleone Google risquerait de ne pas aimer cette jurisprudence, lui qui affiche en premier celui qui le paie le plus… Ah oui mais non c’est pas pareil parce que vous comprenez Google a le droit mais pas Booking.
Il faut être sérieusement naïf pour croire que Booking ne va pas jouer sur les autres paramètres de son algorithme pour attribuer un classement qui lui est favorable (en langage bookinguien, ça veut dire "qui rapporte muchas pesetas") ! C’est sur la transparence globale de l’algorithme qu’il fallait agir, pas sur un seul et unique ingrédient. #ahbon
Exit toutes les autres demandes
Pas d’amende, pas de publication du jugement dans la presse, juste un tout petit article 700 de trois mille euros alloué au ministre. Ça sent la victoire écrasante sur le grand méchant !
Conclusion
L’exécution provisoire ordonnée par le tribunal n’apporte finalement pas grand-chose puisque les articles litigieux avaient déjà disparu des contrats Booking. En attendant le plus que probable appel de Booking sur le sujet du classement qui mérite un soupçon plus de recul que la vision par un trou-de-serrure, on imagine aisément la voix de Liliane disant à son José « laisse moi Booking continuer à faire mson p’ti bazar ».
Voici une illustration par l’exemple du fait que le temps de la justice ne correspond pas du tout au temps des affaires, car au final ça nous fait une belle jambe de faire constater par un juge que des abus ont eu lieu. Se plaindre ou survivre, telle est la question que se posent aujourd’hui les entrepreneurs, mais hélas aucun gouvernant n’a vraiment compris cet état de fait.
Tout est donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles...
#lesbêtessontbiengardées
Le jugement en pdf
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